L'actualité de la course
© Jean-Marie Liot / ALeA / TJV17
Le film de la course : Duel sans merci chez les Multi50
La 13ème Transat Jacques Vabre s’achève donc sur la victoire d’Arkema en Multi50. En tête plus des deux-tiers du parcours, Lalou Roucayrol et Alex Pella ont impressionné par leur détermination, le rythme imprimé dans les conditions difficiles de l’Atlantique nord, et ont eu ce qu’il faut de réussite dans le Pot au noir pour s’imposer à Bahia.
Si pour faire un grand vainqueur, il faut un beau second, alors Lalou et Alex sont comblés. Ils gagnent à la régulière une guerre d’usure contre Erwan Le Roux, triple vainqueur de l’épreuve, associé à Vincent Riou, qui détient le doublé en Imoca. Retour sur un match de très haut niveau.
Des fourmis dans les jambes… La veille du départ du Havre, bonnet vissé sur la tête, Alex Pella sautille déjà sur le trampoline d’Arkema et répond à une question sur la superstition : « Pour gagner une course, dit l’espagnol, il ne faut pas penser à la gagner. Juste se concentrer sur la trace et comprendre les éléments qui t’entourent : la mer, l’atmosphère, les concurrents … »
Avant d’y penser à cette victoire, il a donc fallu aller la chercher. Et dès la première nuit, le tandem Roucayrol/Pella semble au diapason pour attaquer la Manche bille en tête dans des conditions casse-bateau. Rebelotte le second jour de course à l’approche du front où Lalou avoue avoir été obligé de calmer le jeu. « Ca envoyait dans tous les sens et on s’est envolé plusieurs fois » Derrière, les autres Multis50 jouent la prudence, si tant est que ce soit possible sur ces mobylettes océaniques. Quatrième, en retrait de 30 milles, FenêtréA-Mix Buffet passe plus au Nord. Il se retrouve derrière le front un peu plus proche du centre des hautes pressions.
Au troisième jour de course, l’expérience commence à parler et les décalages s’opèrent. Alors que Réauté Chocolat tente d’esquiver par le Sud et que Ciela Village s’accroche malgré de gros soucis d’informatique et de pilote, Erwan Le Roux et Vincent Riou accélèrent fort. La course prend des allures de duel. Les deux plus capés sont là où on les attendait, en tête.
Au portant, dans une mer encore croisée, l’heure n’est toujours pas au repos. Le premier plat chaud est avalé mercredi sur Arkema et les organismes sont mis à rude épreuve. FenêtréA-Mix Buffet empanne le premier et croise en tête pour rejoindre l’alizé de Nord-Est. 8 heures plus tard, Arkema reprend le dessus en tenant près de 21 nœuds de moyenne pendant 24 heures, s’approchant aux dires de Lalou de « la zone rouge »
Dans la soirée du 8 novembre, Drekan Groupe chavire, rappelant que l’équilibre d’un petit multicoque est fragile dans ces temps à grains. Les deux skippers sont récupérés sains et saufs au petit matin. Quant aux poursuivants du tandem Arkema/FenêtréA-Mix Buffet, ils sont relégués à plus de 100 milles.
Toute la journée, la mer se calme, proposant enfin de belles conditions de glisse. Erwan Le Roux et Vincent Riou anticipent parfaitement la bulle à traverser entre Canaries et Cap Vert, un œil déjà sur le Pot au noir. Et ça paye. Dans la nuit du 10 novembre, ils reprennent la main et allongent la foulée. Au matin du 11, ils ont plus de 60 milles d’avance, 100 le lendemain à l’entrée du Pot au noir, à l’heure où Ciela Village se déroute sur le Cap vert pour abandonner le lendemain.
L’incroyable retournement de situation se produit alors. En 36 heures, Arkema reprend près de 160 milles à FenêtréA-Mix Buffet. A terre, on interroge les nuages. L’atmosphère a beau être vache dans le Pot au noir, tout de même… Le lendemain, on apprend que la drisse de gennaker du leader a cassé entre deux grains. L’ avarie prive Erwan Leroux et Vincent Riou d’une voile capitale. Arkema est déjà dans l’alizé de Sud-Est et ne se retourne pas. Le plan Neyhousser avale les 1400 milles qui le séparent de Bahia à 22 nœuds de moyenne et continue de creuser l’écart.
A 8 h 49 ce matin, en coupant la ligne d’arrivée, Lalou Roucayrol et Alex Pella peuvent commencer à penser à la victoire.